Les 4ème et 5ème arrondissements de Marseille abritent une assez grande diversité sociale, entre quartiers de classes moyennes (Cinq avenues, Blancarde, Conception-Baille), quartiers en cours de gentrification (Camas, Longchamp), et quartiers plus populaires (Chutes Lavie, Chartreux, St Pierre). L'Atelier s'intéresse aux manières dont les habitants co-habitent dans cet espace, et comment les politiques municipales se saisissent (ou pas) de cette diversité sociale.

Il est courant de souligner l'importance des ségrégations socio-spatiales qui marquent la ville de Marseille - notamment entre un nord populaire et un sud plus bourgeois, mais aussi entre les cités d'habitat social et des noyaux villageois souvent moins défavorisés, avec un centre ville très paupérisé. Ces ségrégations, les inégalités et les discriminations qui l'accompagnent, sont un facteur structurant de la ville et se rappellent à nous quotidiennement.

Dans les 4ème et 5ème arrondissements, ce n'est pourtant pas le terme qui vient à l'esprit. Il y a des différences sociales, marquées dans l'espace et porteuses d'injustices - mais dans l'espace des rues, des places, des squares, parcs et jardins, dans celui d'une partie des écoles publiques et des infrastructures sportives et de loisir, il semble exister une certaine diversité. Cette diversité est-elle pour autant "mixité" (diversité bénéfique, facteur de cohésion voire d'ascension sociale), ce n'est pas nécessairement le cas.  L'Atelier souhaite analyser les formes multiples que prend cette "co-habitation" sur le territoire de ces deux arrondissements: dans les usages et les interactions, mais aussi (et surtout) dans les manières dont la municipalité voit, construit, se saisit de cette diversité sociale comme d'un objet de ses interventions.

L'espace public urbain est par définition caractérisé par la co-présence d(une diversité de groupes sociaux - diversité qu'il reste à caractériser, selon sa nature (diversité de classes sociales, d'appartenance ethnique, de genre, d'âge, ou d'usages), et son degré (avec de écarts et des contradictions plus ou moins prononcés entre les groupes, selon les espaces et les moments). 

Les travaux d'étudiants s'attachent d'abord à identifier des pratiques, des représentations et des attentes différenciées selon les groupes; et à en analyser la coexistence au sein d'un même espace. Interrogations parfois normatives: cette "co-habitation" au sein du quartier ou de l'espace public est-elle harmonieuse, est-elle bénéfique aux membres du groupe (on parle alors de mixité sociale)? Est-elle marquée de conflits ou de tensions - et si oui, comment, autour de quels enjeux? Est-elle relativement stable, ou dynamique - tend-t-elle à évoluer dans le temps (d'une journée, d'une année, ou d'une période)? 

Deux études approfondies (au parc Lonchamp, dans l'Espace Multisport Beausoleil), observent les pratiques et les interactions entre les groupes sociaux locaux dans des espaces publics très fréquentés du secteur, et en cours de réaménagement. Au parc Longchamp, l'analyse s'est surtout attachée aux pratiques populaires du parc, qui sont relativement absentes des discours collectifs et des processus participatifs pour le réaménagement du parc. A Beausoleil, ce sont les différences de groupes d'âge et de genre qui ont surtout attiré l'attention des étudiants, dans leurs usages, leurs modes de sociabilité, et leurs attentes spécifiques envers la rénovation du site.

Comment les pouvoir publics et notamment la municipalité se saisissent-ils des inégalités sociales qui marquent la ville? L'Atelier Marseille 4-5 s'attache à analyser et comprendre les ressorts des politiques de redistribution (et plus largement de solidarité) opérées dans l'espace urbain, à différentes échelles, par les acteurs publics divers, mais aussi les collectifs d'habitants. Il s'agit aussi d'en comprendre les effets, multiples, parfois inattendus, voire contradictoires, dans l'espace urbain - considérant que la construction de solidarités (à l'échelle d'une rue, d'un quartier, d'une ville) est un processus complexe - entre la radicalité d'un principe redistributif et les compromis nécessaires pour les rendre acceptables, voire désirables, pour le voisinage.

La lutte contre les discriminations est au coeur du programme de la mairie élue depuis 2020. Mais comment construire l'égalité? A côté des politiques redistributives indispensables, à côté d'un effort nécessaire d'investissement public dans les quartiers les plus défavorisés de la ville, plusieurs politiques publiques locales s'attachent à construire un environnement attentif à la diversité et luttant contre les discriminations. 

C'est la question du genre qui semble la plus investie par les élus à cet égard. Deux projets de l'Atelier Marseille 4-5 (2022-23) ont observé la fabrique de ces initiatives - le réaménagement des cours d'école (autour de leur désimperméabilisation) qui permet également de réaménager les activités de récréation des enfants; et les politiques sportives attentives à la question du genre.


L'enclosure résidentielle n'est pas nouvelle dans les villes, elle est  assez généralisée à Marseille où 1/3 des rues n'ont pas été municipalisées et sont donc privées, ce qui facilite leur fermeture, par les copropriétés qui le souhaitent. A l'occasion de travaux thématiques, Atelier Marseille 4-5 a étudié plusieurs de ces enclosure, en quartier populaire (quartiers des Chutes Lavie et de Beausoleil). Il en ressort que ces dynamiques mêlent (dans ces quartiers) souci de distinction sociale et volonté de réguler le stationnement automobile, dont la présence dans l'espace public ou collectif se fait envahissante. Une spécificité des enclosures étudiées est leur profil social qui soit reste populaire, soit est marqué par une grande diversité sociale interne à ces résidences fermées, complexifiant l'équivalence souvent faite entre fermeture d'un quartier et dynamique de ségrégation résidentielle.

Embourgeoisement, rajeunissement, transformation commerciale, la vulgarisation du concept de "gentrification" conduit à la dilution progressive de son sens initial pour recouvrir une diversité de dynamiques démographiques entraînant mutations sociales et commerciales des espaces urbains. Alors que les 4ème et 5ème arrondissement de Marseille connaissent différentes dynamiques démographiques dans des quartiers de plus en plus attractifs (Camas, Longchamp), encore très populaires (Chutes Lavie, Chartreux, St Pierre) ou vieillissant, il s'agit ici de les mettre à jour et de les analyser afin d'interroger l'importance et les effets des multiples "gentrifications" dans le secteur.

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